Dans ce  nouveau chapitre vous allez pouvoir suivre les différentes étapes de la construction d'une frégate en cette fin du dix-huitième siècle. Cette frégate est l'Hermione, une frégate dite de douze, car elle porte sur son pont de  batterie 26 canons tirant des boulets de 12 livres. Officiellement, elle est classée comme frégate de 32 canons, car en plus de ses 26 canons de 12, elle est destinée à porter 6 canons de 6 livres sur ses gaillards.

A Rochefort est en reconstruction une Hermione à l'identique qui en 2015 devrait refaire le même voyage jusqu'à Boston que celui fait en mars 1780 par la véritable Hermione avec à son bord le jeune major général de La Fayette.

 

Site de l'Hermione-Lafayette, cliquez ici.

L’Hermione est née de la décision du Conseil de marine tenu à Rochefort le 23 octobre 1778 et mise en chantier en décembre de la même année. C’est l’ingénieur constructeur de Marine Pierre Chevillard dit l’aîné qui est chargé de sa construction.  

 

► Pour les pièces de charpente, il a fallu trouver 1 500 chênes. D'autres essences sont utilisées comme le buis pour les poulies, l'orme pour les affûts, et le pin pour les mâts et les vergues. 


 

► La construction commence par la pose de la fausse quille en sapin. Sa largeur est de 325 mm, sa hauteur de 390  et son épaisseur de 80. Elle est en composée de trois pièces comme la quille qui la surmonte.

  

 

► Une entaille en forme de V court sur toute sa longueur. C’est la râblure, qui va servir d'appui au premier bordage.

 

► Cette quille est posée sur un chantier soutenu par des pièces de bois appelées tins.  

 

 A l’arrière, on installe l'étambot, et les contre étambot  et faux étambot qui le renforcent. 

  

► Toujours à l’arrière est maintenant installée l'arcasse qui sert d'appui aux bordages de l’arrière. Elle est formée de barres de 30 cm de largeur et 27 cm d’épaisseur dont les extrémités reposent sur l'estain. L'extrémité des bordages s'appuie sur une barre appelée lisse d'Hourdy. 

 

 

 ► On met en place les couples de levée. Entre ces couples de levée retenus par des lisses en sapin vont ensuite être installés les couples de remplissage. 

  

► A l’avant les trois derniers couples ne sont plus perpendiculaires à la quille, mais au bordé. Ce sont les couples dévoyés.

 

 Début 1779, tous les couples sont en place.

  

 

►Les ouvriers travaillent ensuite au bordage extérieur.

 

Source: Bibliothèque et Archives Canada, www.collectionscanada.gc.ca

►En février, la coque de l 'Hermione est entièrement bordée. 

 

► C'est au tour du vaigrage ( 7 ) , c'est à dire au au revêtement intérieur. On installe aussi les bauquières ( 9 ), qui vont soutenir les baux ( 3 ), poutres supportant les ponts.

 

 

http://www.hermione.com/

 

► Puis vient la pose des préceintes, bordages extérieurs plus épais ( 325 mm de largeur et 163 mm d'épaisseur ) qui ceinturent la coque.

 

En mars, sont ouverts sur chaque bord les 13 sabords armés et le sabord de chasse non armé de la batterie.

 

► On installe ensuite la carlingue, pièce de bois en trois parties, qui va coiffer les varangues des couples.

  

►  Ensuite vient le bordage des différents ponts : faux-pont, pont de la batterie et ponts des gaillards.

 

► On installe à l'arrière le tableau, 

                         

 

 ► puis les bouteilles  sur les flancs ( toilettes des officiers ).

 

► Les sculptures de l'Hermione sont peintes en jaune, les entre-sabords en ocre jaune, le reste des œuvres mortes en noir. L'intérieur des pavois et la plupart des éléments d'accastillage sont en ocre rouge. La carène reçoit un enduit de protection blanc. Elle sera par la suite recouverte de plaques de cuivre.

 

► A l’avant, dans le prolongement de l’étrave est installée la guibre. Cet assemblage de plusieurs éléments en bois est réunie à la coque, par des jottereaux, entre lesquels prennent place les poulaines (toilettes des hommes).

 

 


 

Aménagement de la cale  de l’Hermione

 

 

 

 

 

Tout en arrière de la cale on trouve la grande soute aux poudres, isolée par une double cloison.

 

On trouve ensuite une petite soute pour le vin du Capitaine, dit le « caveau du capitaine » qui sépare la grande soute à poudre de la cale à vin. 

 

 

L’archipompe est formée du grand mât et des quatre pompes qui l'entourent.

 

En avant de l’archipompe prennent place les puits aux boulets.

 

Ensuite, c’est la cale à eau.

 

La fosse aux câbles

 

De chaque côté du mât de misaine on trouve les coffres où est entreposée la poudre destinée aux canons de l'avant.

 

 

Tout à l’avant, on trouve le logement du maître d’équipage.   

 

 

 

 La cale est surmontée d’un faux-pont continu.

 

   

A l’arrière dans la Sainte-Barbe, on trouve les logements du maître canonnier, de l'aumônier, de l'écrivain et du chirurgien.

 

 

Desservie par la grande échelle, la fausse Sainte-barbe est réservée à l'état-major. Elle comprend le carré au centre,  et six chambres. 

Un four à pain est situé entre le grand mât et le grand panneau.  

Ensuite vient un espace réservé à l'équipage. C’est là que prendra place un parc à moutons entre le grand panneau et le panneau aux câbles.

 

 

 

 A l’avant se trouvent les soutes et le logement de la maistrance. 

 

 

 

 

 

 

 

Un étage plus haut se trouve le pont de batterie,

pont qui supporte les 26 canons de 12 livres de l'Hermione.

 

  

 

A l'arrière on trouve la grande chambre, logement du commandant..

 

Le pont de la batterie avec ses 24 canons de douze livres est également l'espace où mangent et dorment la plupart des hommes.

 

En avant de la grande échelle, on trouve le grand cabestan, l'écoutille aux vivres, l'échelle de l'équipage,

 

 

le grand panneau, les embarcations, le panneau des câbles, la cuisine, et les grandes bittes.

  

 

Les Gaillards

 

 

 

 

 

Au-dessus de la batterie, les ponts des gaillards sont reliés entre eux par des passerelles nommées passavants.Sur les gaillards sont installés les huit canons de six livres, et les dix pierriers d’une livre.


La double roue du gouvernail est en arrière du mât d'artimon.

Devant le mat d’artimon, prend place la grande échelle

Puis quatre panneaux à caillebotis, suivi de l'écoutille aux vivres.

Sur le gaillard d'avant, on trouve le petit cabestan

  


 

En avril 1779, la coque est achevée. Le bâtiment est certifié conforme.

 

 Le 28 avril l’Hermione est mise à l’eau.  

 

 ► La frégate reçoit ensuite son gouvernail commandé par la double barre à roue située sur le gaillard d'arrière grâce à un système de palans.

 

► L'Hermione embarque ses cinq ancres. La plus grosse est la "grande ancre", également appelée "maîtresse ancre"ou "ancre de miséricorde", qui est au niveau du grand panneau, ses pattes reposant sur le premier pont. 

 Sur cette photo du modèle de Jean Thomas vous apercevez le four à pain (à droite en rouge) à l'arrière de l'ancre de miséricorde. Au dessus, le pont de batterie est maintenant en construction.

source : l'Hermione, La Frégate de la liberté

► Sur le porte-hauban de misaine tribord, prend place l'ancre de veille qui pèse 3 450 livres.

 La joue tribord du navire, le  porte-hauban de misaine avec l'ancre de veille. Au bossoir la grande ancre soutenue par sa bosse de bout  avec sa  bouée d'ancre à poste à l'avant du porte hauban.

source : http://www.amarsenal.be 

► La joue tribord du navire, le  porte-hauban de misaine avec l'ancre de veille. Au bossoir la grande ancre soutenue par sa bosse de bout  avec sa  bouée d'ancre à poste à à l'avant du porte hauban. 

► L'ancre d'affourche pèse 3 300 livres et elle repose sur l'avant du porte-hauban de misaine bâbord. Les deux ancres à jet pèsent 1100 livres et prennent place l'une au-dessus de l'autre sur l'arrière du porte-hauban de misaine bâbord. 

Côté bâbord avant, l'ancre d'affourche au bossoir traversée et fixée à son apôtureau  par une serre-bosse.    En dessous du canon du gaillard, les deux ancres à jet.  

source : http://www.amarsenal.be

L'Hermione possède une chaloupe, un grand canot, un petit canot.

  


 

Les mâts de l'Hermione

 

 

 

► Il y a trois mâts formés chacun de trois éléments, bas-mât, mât intermédiaire et mât supérieur. Un quatrième mât, le beaupré est installé à l'avant, incliné de 25 à 30 degrés sur l'horizontale.

► Les bas-mâts sont réalisés à partir d'un assemblage de plusieurs pièces autour d'une partie centrale, la mèche. Pour renforcer l’ensemble, le mat est ceint de cercles de fer. Seul le bas-mât d'artimon est réalisé dans un seul tronc; il est dit à pible. 

► Les dimensions des bas-mâts de l’Hermione sont :

- Beaupré : longueur : 16.25 m. diamètre : 0,70 m

- Mât de misaine : longueur : 25.30 m, diamètre : 0,65 m 

- Grand mât : longueur : 27,30 m, diamètre : 0,75 m 

- Mât d’artimon : longueur : 16,50 m, diamètre : 0,40 m

 

 

 ► C'est une machine à mater qui va permettre de les soulever et de les mettre en place. 

  

► On installe ensuite les étais qui maintiennent les mâts sur l'avant. 

► Il reste à installer les haubans, qui, partant du porte-hauban, montent vers le ton du mât où ils font retour sur eux-mêmes pour revenir vers le même porte-hauban. 

D'après G. Delacroix

 ► À chacune des extrémités du hauban, se trouve un cap de mouton, grosse poulie lenticulaire percée de 3 trous, qui fait face au cap de mouton inférieur fixé sur le porte hauban.

                       Musée de la Marine de Rochefort

 ► Sont ensuite mises en place les enfléchures placées en travers des haubans pour permettre aux marins d’accéder aux sommets des bas-mâts.

 ► On installe les plates-formes de hune. Un trou rectangulaire, nommée « trou du chat » est laissé ouvert au centre de la hune.  

D'après G. Delacroix

► Avant d’installer les mâts supérieurs, la frégate est lestée avec des saumons en fer. 

► De l'avant vers l'arrière on trouve: 

- Le beaupré prolongé par le bout-dehors de beaupré. 

- Le mât de misaine surmonté du petit mât de hune et du petit mât de perroquet. 

- Le grand mât surmonté du grand mât de hune et du grand mât de perroquet. 

- Le mât d'artimon surmonté du mât de perroquet de fougue et du mât de perruche. 

  

Artimon

Bas-mât d'artimon:16.5m

Mât de perroquet de fougue:13m

Mât de perruche:7.5m

Grand mât

Grand bas-mât:27.3m

Grand mât de hune:16.9m

Mât de grand perroquet:12.3m

Mât de misaine

Bas-mât de misaine:25.3m

Petit mât de hune:16.9m

Mât de petit perroquet:11.7m

Beaupré

Bas-mât de beaupré:16.2m

Bout-dehors:12.3m

 

► Les mâts supérieurs de l'Hermione qui sont tous à pible, c'est-à-dire en une seule pièce, sont également retenus par des haubans. 

► Les mâts supérieurs se chevauchent sur une certaine longueur, le sommet du mât inférieur portant un bloc de bois dur, le chouquet, percé d'un trou dans lequel passe le mât supérieur. Le mât supérieur est toujours situé en avant du mât inférieur.

► Le  tirant d'eau du bâtiment absolument vide est de 3.70 mètres à l’arrière et 3.40 m à l’avant. La batterie est alors à 3.50 m du niveau de l'eau. Une fois embarqué tout l’approvisionnement, la batterie n'est plus qu'à 2 m du niveau de l'eau. 

► Les étais, haubans et galhaubans forment le gréement dormant, qu'on ne  touche que pour le raidir. Le gréement courant permet d'orienter les vergues et  les voiles.  

► Les vergues sont de longues pièces de pin placées en avant du mat et qui pivotent contre celui-ci. Elles sont munies de marchepieds pour les marins.

 

Musée de la Marine de Rochefort

► Sur les bats mats prennent placent les basses vergues qui restent toujours à poste. La vergue de misaine et la grande vergue portent chacune une voile carrée. La vergue d'artimon ne sert qu'à recevoir les manœuvres de la voile supérieure. Sur le bas-mât d’artimon va prendre place une autre une vergue dite à corne qui supporte une voile aurique. Sous le beaupré enfin les vergues de « civadière » et de « contre-civadière » portent des voiles carrées. 

► Des cordages ( drisses ) permettent de hisser et d'abaisser les vergues.


 

Les voiles de l'Hermione

 

 

► Les voiles de l'Hermione sont de deux sortes :

        - Les voiles carrées fixées sur des vergues transversales, qui assurent l'essentiel de la propulsion du navire;

        - Les voiles axiales qui s'enverguent sur des cornes, ou des étais.

► Il existe aussi les bonnettes qui sont des voiles légères quadrangulaires que l'on installe de part et d'autre des voiles carrées lorsque la brise est légère et bien établie. 

  

  

► Nous sommes en mai 1779. Les deux premières semaines du mois sont consacrées à l'armement de la frégate, notamment l'installation des canons et des pierriers sur les ponts et les hunes.

L'Hermione va ainsi recevoir vingt-six canons de 12 livres et non pas six canons de 6 livres, comme cela devrait être le cas en tant que frégate de 32, mais  huit.

 

D'après les dessins de M. Herrero Michel

 

 

 

► Dix pierriers d'une livre, et quatre d'une demi-livre sont installés sur les gaillards et sur les hunes.

 

Pierrier présenté à l'exposition sur La Pérouse du Musée de la Marine 

► Après une première campagne du 18 mai au 31 décembre 1779, la coque sera en janvier 1780 recouverte de 1100 plaques de cuivre. 

► Cela fait à peine six mois que l'Hermione a été mise en chantier, et déjà elle est prête à affronter l'ennemi.

► Nous sommes le 15 mai 1779. Mr de La Touche, lieutenant de vaisseau qui a suivi comme nous la construction, vient de monter à bord. Il passe en revue les officiers, les marins et les soldats qui vont servir sur la frégate. C'est par ce geste qu'il signifie sa prise de commandement.

► Dès le 22 mai, il est en mer. Jusqu'en fin décembre, l'Hermione va multiplier les missions le long des côtes françaises. L'année suivante, ce sera le départ pour l'Amérique. 

 

► Deux cent trente années plus tard, à Rochefort, une frégate à l'identique s'apprête elle aussi à prendre la mer, sur les traces de son illustre ancêtre.